jeudi 8 novembre 2012

L'usage sonore du monde (11)



Parmi les nombreux albums qu'on aurait voulu inclure dans notre sélection de 100 disques figure Cables & Signs (ten underwater field recordings) de Thomas Tilly (Fissür, 2010). On y entend des sons captés sous l'eau dans les douves du château de Sanzay, dans le Poitou. Mais la portée éventuellement documentaire ou scientifique de cette succession de field recordings est secondaire. Enregistrés à l'aide d'hydrophones, ces sons émis notamment par des insectes aquatiques interpellent avant tout par cette capacité qu'a l'écoute de métamorphoser un phénomène sonore en phénomène musical.
Dans une très intéressante interview publiée dans Revue et corrigée (septembre 2012, no. 93, p. 9), Tilly s'exprime ainsi : "Dans le cas de Cables & Signs, je savais dès la phase de terrain que j'utiliserais ces enregistrements sans les retoucher. Tout m'intéressait, du timbre des sons aux formes qu'ils dessinaient. Et puis j'avais affaire là à quelque chose qui me touchait aussi bien culturellement que théoriquement, c'est-à-dire à des sons plus proches de la synthèse analogique et d'une certaine musique minimaliste que de formes sonores que l'on est en droit d'attendre d'un environnement naturel. Ces sons avaient donc pour moi un sens musical, dès la première écoute (...)."

Pour une écoute de quelques-unes de ces pièces passionnantes, voir ici sur le site de Fissür.
Thomas Tilly a publié cette année un duo avec Jean-Luc Guionnet : Stones, Air, Axioms (Circum-Disc)

Pour l'anecdote, Thomas Tilly a réalisé des enregistrements du micronecte (Micronecta scholtzi, photo ci-dessus), une espèce de punaise d'eau (de plus ou moins 2 mm de long) dont les stridulations émises par le frottement des parties génitales peuvent atteindre les 99 décibels. Cette particularité en fait un des animaux les plus sonores proportionnellement à sa taille ! Voir ici pour plus d'infos sur cet aspect étonnant.

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