mardi 17 janvier 2012

Oeil pour oeil

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En 1599, les Jivaros s'unissent et se révoltent contre l'envahisseur espagnol, notamment à cause du tribut de l'or. Plus de 25000 européens auraient été tués, principalement dans la ville de Logrono. Après cela et pendant presque trois siècles, les Jivaros n'eurent plus que des contacts épisodiques, souvent hostiles, avec les Blancs. Ci-dessous, un extrait de l'Historia del Reino de Quito en la America Meridional, año de 1789 (1842) de Juan de Velasco, repris dans l'ouvrage de Michael J. Harner Les Jivaros. Hommes des cascades sacrées (1972 et 1977 pour la première édition française). La gravure en haut est de Théodore de Bry (1594).
Harner est également l'auteur d'excellents enregistrements captés dans les années 1950 et publiés chez Folkways en 1973 : Music of the Jivaro of Ecuador.
A noter que les Espagnols ont longtemps répugné à qualifier ces épisodes de 'guerre'. Ou la guerre comme preuve d'humanité ?
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"Le chef, Quirruba, qui avait tout prévu et tout préparé avec grande habileté, prit possession de la maison où logeait le gouverneur. Il fit entourer ladite maison et y entra avec un grand nombre d'hommes, apportant l'or que son peuple avait amassé pour les célébrations, ainsi que tout ce qui était nécessaire pour faire fondre cet or. Ils tuèrent tous les gens qui se trouvaient à l'intérieur, à l'exception du gouverneur qui, surpris par cette arrivée, n'avait pas eu le temps de revêtir sa tenue. Ils lui annoncèrent que le temps était maintenant venu pour lui de recevoir l'impôt en or qu'il avait réclamé.
Ils le déshabillèrent complètement, lui lièrent pieds et poings et, tandis que certains se divertissaient fort à le frapper et à se moquer de lui, d'autres installaient dans la cour une grande forge où ils mirent l'or à fondre. Quand l'or fondu fut prêt dans le creuset, ils lui ouvrirent la bouche avec un os, disant qu'ils voulaient voir si pour une fois il aurait assez d'or. Ils lui versèrent petit à petit l'or en fusion dans la bouche, en utilisant un autre os pour le forcer à l'avaler, torture qui fit éclater ses intestins, ce qui déclencha chez tous rires et hurlements.
Cet épouvantable sacrifice humain s'acheva à l'aube ; c'en était fini également de la ville ; pas un homme n'en avait réchappé. L'encerclement fut maintenu jusqu'au lendemain ; les Indiens éteignirent alors les torches de copal qui brûlaient dans les maisons et dans les rues. Tandis qu'ils recherchaient encore ceux qui se cachaient et prenaient tout ce qu'ils pouvaient emporter, ils expédièrent une partie de l'armée dans les deux autres villes pour le cas où leur appui serait nécessaire. Parmi les femmes qu'ils avaient épargnées, ils tuèrent les vieilles et les plus jeunes qui les auraient encombrés, et ils gardèrent les autres pour leur usage. Il y avait dans cette catégorie presque toutes les nonnes du monastère de la Conception (...)."
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